Le coup d'oeil ciné de Titouan

Illustration Alien Romulus

Alien : Romulus, vu par Darkdesign sur le site PosterSpy

Octobre 2024

Alien Romulus : Le rachat de la saga Alien ?

Après 7 ans d’absence au cinéma, la franchise culte Alien a fait son retour en salles cet été avec l’opus Alien Romulus, qui se déroule entre les deux premiers épisodes de la saga. Difficile de parler de ce film sans parler des deux précédents projets Alien, Prometheus et Alien Covenant, tout deux réalisés par Ridley Scott et ayant obtenus des succès critiques très mitigés. Pour ma part, j’avais plutôt apprécié Prometheus au premier visionnage. Le symbolisme gréco-romain, assez bien dosé dans ce film-ci, ainsi que l’idée de départ de montrer l’origine du xénomorphe, et le départ de la saga dans une nouvelle direction m’avaient séduis. J’ai beaucoup moins apprécié ce film, cependant, au second visionnage. Ses défauts d’écriture m’ont sauté aux yeux, notamment la stupidité des personnages et l’absurdité scientifique du film. On va dire que c’est chipoter mais le point fort de la saga, c’est justement que scientifiquement elle tien la route dans la limite du possible et que les personnages ne font rien d’idiot. Et surtout, c’est bien beau de donner une nouvelle direction, mais je n’ai jamais compris où le film voulait en venir, si ce n’est introduire le deus ex machina de Scott : l’huile noire. Cette huile c’est la même substance dans les mêmes vases, on sait pas comment d’ailleurs mais c’est tellement puissant que ça fuit pas par la fente du couvercle mais à travers le couvercle, et ça sert à : désagréger l’ADN d’un extraterrestre pour créer la vie, faire muter des vers de terres en vers de terres plus gros, un humain en zombie, donner à un personnage une nouvelle ADN qui fait naître un poulpe géant qui lui-même engendre avec un extraterrestre un xénomorphe un peu différent des autres, et c’est aussi supposé être un virus. Il faudra aussi m’expliquer pourquoi le film se déroule avant Alien mais les équipements de Prometheus sont plus avancés que ceux d’Alien. Je passe très rapidement sur Alien Covenant, les problèmes sont les mêmes mais en pire, et après ce résumé long mais nécessaire, passons à Alien Romulus.

Alien Romulus, réalisé par Fédé Alvarez, réalisateur de Don’t Breathe et du reboot de Massacre à la tronçonneuse, et qui se déroule entre Alien, premier du nom, et sa suite Aliens, avait pour tâche de rattraper l’échec critique de ses deux prédécesseurs. La critique internationale a globalement chanté les louanges du film tout l’été, et si je suis après un deuxième visionnage moins dithyrambique qu’après le premier, je reste tout de même sur mes positions claires : ce film est très bon, mais il souffre de grosses lacunes que le second visionnage m’a permis de remarquer. C’est un vrai film d’horreur, angoissant, terrifiant, comme ne l’étaient pas les deux précédents opus. L’ambiance, que ce soit par la bande-son, la manière de filmer ces longs couloirs dans l’obscurité comme lors des premiers films Alien, est une ambiance angoissante parfaitement maîtrisée. Certaines critiques ont pointé du doigt le fait film est bourré de clins d’oeil aux films Alien (on ne m’enlèvera pas de l’esprit que ce n’est pas pire que le scénario de Prometheus qui était quasiment stricto sensu le même que celui de Alien vs Predator que Scott avait pourtant vivement critiqué) mais cela ne m’a jamais dérangé, le film apportant tout de même des scènes d’horreurs inédites dans la saga, et remplissant son objectif premier : faire peur, tout en apportant des éléments importants dans la saga. La réalisation de Fede Alvarez colle parfaitement avec le film, et son style assez trash fonctionne finalement plutôt bien, avec ce xénomorphe vicieux, horrible et dérangeant. C’est d’ailleurs parfaitement le mot, c’est l’un des films de la saga les plus dérangeants. Même si Alien 3 et Alien Ressurection faisaient fort dans le domaine, les images crues de celui-ci, la violence du xénomorphe plus le fait qu’elle s’exerce en partie sur une femme enceinte, l’atmosphère du vaisseau désaffecté dans lequel l’intrigue prend place, et son plot twist final dont je reparlerais par la suite, sont tout de même particulièrement efficaces dans cet esprit. On a aussi des scènes angoissantes où les personnages doivent être silencieux et durant lesquelles la musique elle-même se tait, ce qui crée une peur chez le spectateur d’entendre le moindre bruit. C’est simple, certes, Fede Alvarez n’a absolument rien inventé dans sa manière de faire, mais c’est ça qu’on avait perdu avec Prometheus et Covenant : de la peur, de la vraie peur, simple peut-être, sans originalité peut-être, mais efficace.

Le principal défaut du film réside en réalité dans sa chute. Pour expliquer cela, il faut avoir en tête une chose : le schéma que l’on retrouve dans tout les films hollywoodiens est un schéma en trois actes que l’on peut résumer ainsi : le premier acte, c’est la situation initiale. On voit les personnages dans leur vie de tout les jours au début du récit. Cet acte est coupé par l’élément déclencheur, qui est l’élément qui va venir faire basculer cette situation initiale (exemple tout simple : dans Harry Potter, Harry vie chez son oncle et sa tante dans le placard sous l’escalier, c’est l’acte 1, qui se termine par l’arrivée du garde-chasse de l’école de sorcellerie Poudlard, c’est l’élément déclencheur). Le deuxième acte, c’est toutes les péripéties qui font avancer l’histoire jusqu’à sa résolution. Et le troisième acte, que l’on appelle aussi le « Climax » à Hollywood, c’est la grande péripétie finale qui va résoudre ou pas les problèmes posés dans les actes 1 et 2 afin d’arriver à une situation finale. La particularité de la saga Alien, c’est que chaque film se fonde sur un schéma en 4 actes : les 3 premiers actes se déroulent normalement, et un élément inattendu vient relancer l’intrigue pour un quatrième et dernier acte. Et dans Romulus ça donne une double incohérence énorme et parfaitement évitable. Plus tôt dans le film on nous explique (enfin) comment fonctionne l’huile noire et pourquoi elle possède différentes caractéristiques selon les êtres qui entrent en contact avec. La femme enceinte dont j’ai parlé au début du film se retrouve bien amochée, et elle a une seringue d’huile noire à côté d’elle. Sans savoir ce que c’est ni à quoi ça sert, elle s’en injecte ce qui, première erreur, rend le quatrième acte prévisible y compris pour les gens qui découvrent la saga avec ce film. Et dans le quatrième acte (que je trouve malgré tout absolument terrifiant, avec ce monstre hybride humain-alien dérangeant et terrifiant au possible) on a une nouvelle utilisation de l’huile noire, sans explication de pourquoi ça fonctionne comme ça et en créant une incohérence avec Prometheus (je vais pas la dire souvent cette phrase ). C’est dommage au vu du très bon film qu’est Alien Romulus de finir entaché par une erreur si grossière mais nul film n’est parfait. Ce film reste et restera un bon retour pour la saga Alien au cinéma, un retour aux sources dont la franchise avait grandement besoin. En attendant maintenant la toute première série Alien qui sortira en 2025, Alien Earth, qui se déroulera avant les événements de Prometheus.

Titouan Parenty-Lecarpentier
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