Patrimoine naturel
Les zones humides sont des réservoirs de biodiversité, amphibiens et reptiles en particulier sont étudiés et recensés dans ces espaces. Les méthodes scientifiques de suivi des populations sont mises en œuvre sur le territoire de notre étude. En février 2024, nous avons rencontré deux spécialistes en la matière (Olivier Swifft et Marius Jourdain) lors des conférences données à l’occasion des journées mondiales des zones humides organisées par la Communauté de communes Pont-Audemer / Val de Risle, ville labellisée cette année Ramsar dans le cadre de la
signature d’une convention.
Rencontre avec Olivier Swifft, bioacousticien
Olivier Swift est un naturaliste et bioacousticien, qui étudie le complexe des grenouilles vertes au niveau de la réserve naturelle nationale de l’estuaire de la Seine, depuis 2017. Pour recontextualiser, la grenouille verte est une espèce dite "hybride", c’est à dire qu’elle provient du croisement d’espèces différentes : ici, un croisement entre la grenouille Lessona et la grenouille Rieuse. À noter que ces 2 dernières espèces ont commencé à se reproduire il y a 8000 ans, lors de la dernière grande glaciation, en migrant l’une vers l’autre. La grenouille verte est donc issue de deux espèces contenant chacune des gamètes très différents, faisant là toute son hybridité. Cependant, ces grenouilles vertes se confondent énormément physiquement avec leurs ascendants, et les reconnaître semble difficile. Mais l’on sait que Lessona et la Rieuse ont des chants distincts de la grenouille verte, où cette dernière possède un chant dit plus "claquant". Olivier Swift nous explique que la bioacoustique joue un rôle très important, puis qu’elle permet d’étudier le son dans le vivant, et plus particulièrement au niveau des multiples grenouilles. Grace à des enregistreurs, et durant la nuit, le son des grenouilles peut être enregistré afin que ces données soient extraites par un logiciel statistique tel que "R". Par exemple, en 2023, 50 individus au total ont pu être capturés, avec 100% d’exactitude; faisant de la bioacoustique une méthode très fiable quant à la capture permettant la différenciation de plusieurs types de grenouilles. De ce fait, la grenouille verte (de son nom "Pelophylax lessonae") peut être identifiée grâce à son chant, au delà de ses caractéristiques physiques. Par ailleurs, la bioacoustique permet de comprendre la conservation ainsi que la répartition de la grenouille verte en fonction de son environnement : cette compréhension est essentielle à la protection de cette espèce.
Lucille Cras
Rencontre avec Marius Jourdain, responsable du PRA
Le PRA : Plan Régional d’Action en faveur des amphibiens et reptiles en péril
Le PRA est coordonné en Normandie par Marius Jourdain et mis en œuvre sur 10 ans. Le PRA s’investit pour protéger 11 reptiles et 18 amphibiens dans la région. 3 espèces d’amphibiens sont en péril :
- le sonneur à Ventre jaune (crapaud le plus menacé, supposé disparu mais réapparu en 2001, présent seulement dans 1 endroit ; il vit dans des milieux pionniers)
- le pélodyte ponctué (vivant dans des milieux pionniers, zones inondables de fond de vallée ; carrières, zones humides) ;
- le crapaud calamite (plus gros, 5cm environ, comparé au 2 autres d’environ 3 cm et vivant dans des zones inondables).
2 espèces de reptiles sont en péril car par peur, beaucoup de personnes les tuent, malgré le peu de morsures constatées. Entre autres,
- le lézard des souches (le plus menacé et le plus grand, en moyenne 23cm, habitat type les landes, milieux sableux… Beaucoup de ses habitats sont dégradés)
- la vipère péliade (la seule venimeuse en Normandie, presque disparue 20 ans, vivant plutôt dans des zones humides).
Le PRA comprend environ 50 participants, 13 objectifs et 39 actions (ex: mise en place de suivi sur les principales espèces, sécurisation des espèces à enjeux…).Il tourne autour de 4 axes: coordination (animer le PRA, planifier, centraliser), connaissance scientifique (acquérir des données, mieux connaître les espèces, lancer des missions de recherche), gestion et conservation des espèces (accompagner les gestionnaires, préserver les sites, faire changer les pratiques, réintroduire des individus ) communication et sensibilisation (former spécialistes et grand public, faire connaître les espèces, limiter les destructions d'individus). La mise en œuvre le PRA nécessite 3 actions : identifier les enjeux (une espèce du PRA est-elle présente? Etat des populations? Menaces?), travailler au sein du PRA (échanger avec les coordinateurs, travailler de concert avec les autres acteurs, partager ses forces d'expériences) et agir (inventaires, actions de gestion et de sécurisation, sensibilisation)
Lili Presse-Ausseurs